DOUALA : Atelier de formation à l’élaboration des projets et à la recherche des financements auprès des bailleurs
Du 26 au 30 mai 2025, Douala accueille un atelier régional de formation sur la gestion durable des écosystèmes forestiers d’Afrique centrale. Une initiative phare portée par le Centre de Recherche Forestière Internationale (CIFOR) et le Centre International de Recherche en Agroforesterie (ICRAF), avec le soutien financier de l’Union européenne, dans le cadre du programme RESSAC. Au cœur des échanges : la montée en compétences des chercheurs et praticiens pour une meilleure mobilisation des financements et une utilisation accrue de la recherche appliquée dans les politiques et les actions sur le terrain.

Dans un contexte mondial de transition écologique, l’Afrique centrale, forte de son immense bassin forestier, est appelée à jouer un rôle stratégique. Toutefois, les défis sont nombreux : déforestation, exploitation non durable, accès limité au financement de la recherche, gouvernance environnementale fragile… C’est pour répondre à ces enjeux que l’atelier organisé à Douala par le CIFOR-ICRAF propose, durant quatre jours, un programme intensif de renforcement des capacités, centré sur la formulation, la gestion et le financement de projets de recherche appliquée en écologie et en sciences sociales.
Ouvrir la voie à une nouvelle génération de projets durables

Dr. Richard Sufo, coordinateur du projet RESSAC, l’objectif est de doter les chercheurs de compétences opérationnelles pour transformer leurs idées en projets concrets et financés. « Cette formation est capitale car nous soutenons actuellement 26 projets de recherche. Certains bénéficient de financements allant jusqu’à 300.000 euros. Il faut maintenant s’assurer que ces chercheurs puissent continuer à innover, à impacter le terrain, mais aussi à communiquer efficacement leurs résultats. »

L’atelier n’est pas un simple séminaire académique. Il est conçu comme un espace interactif et stratégique pour décloisonner la recherche, favoriser les alliances avec les acteurs de terrain et mieux répondre aux attentes des bailleurs de fonds.
Une approche pragmatique et ciblée
À la manœuvre, le Dr. Mamadou Diallo, formateur principal de Synm International (Canada), qui a déjà conduit plusieurs sessions similaires à l’international. Il explique : « Cette formation vise à combler un vide critique. Nous avons structuré les modules autour de trois axes : la formulation rigoureuse des projets, leur exécution et leur évaluation, et surtout l’identification des guichets de financement appropriés. Beaucoup de chercheurs ont des idées brillantes, mais peinent à les traduire en propositions attractives pour les bailleurs. »

Une problématique que confirme Emery Etounghe Efer, président du comité scientifique du programme RESSAC : « En Afrique centrale, nous savons écouter le terrain, formuler des hypothèses, mais nous manquons des outils pour intéresser les bailleurs. Cet atelier nous aide à aligner nos propositions sur leurs exigences. C’est une vraie stratégie de renforcement de la chaîne de valeur de la recherche. »
Mobiliser la recherche au service du développement local
Le programme RESSAC, lancé en 2022 pour une durée de quatre ans, repose sur une vision claire : mobiliser la recherche scientifique pour répondre aux défis concrets des acteurs de la gestion forestière – administrations publiques, gestionnaires d’aires protégées, communautés locales, opérateurs privés, etc.
Le professeur Marie Louise Avana, adjointe au coordinateur CIFOR-ICRAF à Yaoundé, revient sur l’esprit du projet :
« Le CIFOR-ICRAF, dans sa mission de générer des connaissances utiles aux politiques publiques, s’est donné pour ambition de former des ressources humaines locales capables de capter des financements, de piloter des consortiums de recherche et de renforcer l’expertise régionale. L’atelier de Douala marque une étape clé : nous voulons que les chercheurs soient à même d’écrire eux-mêmes de nouveaux projets, de se positionner dans les appels à projets internationaux, et de poursuivre l’effort même après la fin du programme. »

Une formation au croisement des disciplines et des cultures
L’un des enjeux majeurs du programme est de croiser les sciences sociales et les sciences écologiques pour aborder la forêt comme un système complexe, à la fois écologique, économique, social et politique. Les thématiques de recherche ciblées sont multiples : foresterie communautaire, conservation des aires protégées, cartographie des droits coutumiers, gestion durable du bois énergie, biodiversité, conflits d’usage, entre autres.
Dr. Suzanne Meghe Kamga, participante à l’atelier :
« Cette formation est essentielle, surtout dans notre contexte africain où la recherche est sous-financée. Nous devons apprendre à structurer des projets qui répondent aux besoins locaux tout en étant lisibles et attractifs pour les bailleurs internationaux. Cet atelier nous donne une vision claire des critères à respecter, des aspects à valoriser. »

Apprendre à parler le langage des bailleurs
Pour Dr. Graden Froese, intervenant, l’un des apports majeurs de la formation est justement de combler ce fossé :
« Ce que j’ai retenu, c’est l’importance de cibler les bons partenaires dès le début et de comprendre les attentes des grandes institutions. Beaucoup d’entre nous ne savent pas comment structurer un projet ou approcher des institutions comme l’Union européenne ou la Banque mondiale. Le formateur nous guide étape par étape dans cette démarche. »

Un enjeu régional, une portée globale
À travers l’atelier de Douala, le programme RESSAC démontre la nécessité d’ancrer la recherche dans les territoires tout en l’ouvrant sur les dynamiques globales. Il ne s’agit pas seulement de produire des connaissances, mais de leur donner une utilité sociale, économique et écologique concrète.

En investissant dans les compétences humaines, en rapprochant les chercheurs des acteurs de terrain, en outillant les scientifiques pour accéder aux financements internationaux, l’initiative entend jeter les bases d’une nouvelle génération de projets portés par l’Afrique centrale, pour l’Afrique centrale.

Afric-eco/Brigite EMAMBO MBONDY


