Industrie métallurgique : Prometal Groupe injecte 88 milliards FCFA dans une usine de transformation d’aluminium à Douala

Avec le soutien massif de banques locales et de Proparco, le groupe camerounais pose les jalons d’une révolution industrielle dans la chaîne de valeur de l’aluminium. Un signal fort envoyé aux investisseurs et à l’économie nationale.

Le 12 septembre 2025 à Douala dans une cérémonie à forte teneur économique et symbolique, présidée par le Premier ministre Joseph Dion Ngute, le groupe Prometal a franchi une nouvelle étape dans sa trajectoire industrielle avec la pose de la première pierre de son usine de transformation d’aluminium, baptisée PROALU. Ce projet structurant, fruit d’un investissement de 88 milliards de FCFA, entend repositionner le Cameroun sur l’échiquier sous-régional de la métallurgie et de la transformation locale de matières premières.

Un financement local ambitieux et structuré

Le montage financier de PROALU illustre une mobilisation sans précédent des institutions financières locales autour d’un projet industriel. Un consortium de banques a été constitué autour de la vision portée par Prometal Groupe : BGFI Bank (15,55 milliards FCFA), Société Générale Cameroun (15 milliards FCFA), Afriland First Bank (8,9 milliards FCFA), ainsi que Proparco, bras financier du développement du groupe AFD, qui injecte 15 milliards FCFA.

Ce tour de table illustre la confiance des partenaires financiers dans le projet, mais aussi dans la capacité du tissu industriel camerounais à créer de la valeur localement. Le Directeur Général de Prometal, Hayssam El Jammal, se veut rassurant : « C’est un projet au service de la transformation structurelle de notre économie, en droite ligne avec la SND30 et les objectifs d’industrialisation du Cameroun. »

Une intégration verticale de la chaîne de valeur

PROALU ne se limite pas à la production de tôles. L’usine entend produire 30 000 tonnes/an de bobines d’aluminium brut et prélaqué, autant en acier prélaqué, mais aussi 8 000 tonnes/an de câbles électriques en cuivre et en aluminium, une première à cette échelle pour un opérateur privé local. Des produits jusque-là massivement importés, alors que la demande nationale et régionale est en pleine croissance.

À pleine capacité, PROALU devrait générer 450 emplois directs et plus de 1000 emplois indirects, contribuant à la montée en compétences industrielles et techniques dans le pays.

Une relance industrielle à contre-courant d’Alucam

En toile de fond de ce lancement, se profile un contraste saisissant avec la trajectoire actuelle d’Alucam, entreprise historiquement au cœur de la filière aluminium au Cameroun. Selon un rapport de la Chambre des comptes publié en avril 2025, la société étatique, dont l’État détient près de 80 % du capital, est dans une situation financière critique : capitaux propres négatifs depuis 2019, résultat net déficitaire de plus de 45 milliards FCFA entre 2017 et 2021, et une dette croissante auprès d’ENEO, à hauteur de 47,7 milliards FCFA.

Ce contraste soulève une question de fond sur la place du secteur privé dans la relance industrielle : PROALU semble occuper un vide laissé par Alucam, dont la production a chuté et la compétitivité s’est effondrée après le retrait de Rio Tinto en 2015. Face à l’inaction prolongée de l’État quant à la recapitalisation recommandée (43 milliards FCFA), les initiatives privées apparaissent désormais comme des solutions crédibles, efficaces et opportunes.

Soutenir l’industrie locale : un impératif stratégique

En plaçant la transformation locale au cœur de sa stratégie, Prometal répond à un triple enjeu : réduction des importations, souveraineté industrielle, et création de valeur nationale. Le choix de Douala comme site de construction capitalise sur l’accès portuaire, les réseaux logistiques, mais aussi la proximité avec des fournisseurs stratégiques comme Alucam, bien que ce dernier doive désormais composer avec un nouveau concurrent… ou futur partenaire.

Car la complémentarité industrielle est encore possible. Si les recommandations de la Chambre des comptes sont suivies, et qu’Alucam parvient à redynamiser son outil de production, le marché régional pourrait soutenir plusieurs opérateurs, à condition d’une réorganisation stratégique.

Prometal Groupe : catalyseur de l’industrialisation

Avec PROALU, Prometal Groupe s’impose comme l’un des moteurs de l’industrialisation camerounaise. Après s’être imposé dans la sidérurgie, le groupe franchit un cap stratégique vers l’aluminium, un matériau du futur au cœur de la transition énergétique et des infrastructures modernes.

Dans un contexte où l’État encourage la transformation locale des matières premières, le pari industriel de PROALU pourrait bien devenir un modèle de référence, démontrant que le secteur privé local, lorsqu’il est soutenu, peut transformer les ambitions économiques du Cameroun en réalisations concrètes.

Afric-eco/Nathalie MENGATA

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